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Faut-il écouter les sondages ? / Renaud Février
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Un cri de colère, en pleine présidentielle. Dans un éditorial au vitriol intitulé "Les sondages, inquiétantes dérives", le rédacteur en chef du premier quotidien français, "Ouest-France", François-Xavier Lefranc, avait annoncé dès l'automne que son journal ne commanderait aucun sondage d'intentions de vote et ne commenterait pas ceux des autres. La cause de ce boycott ? La fiabilité des enquêtes d'opinion, mais surtout l'emballement, voire l'hystérisation médiatique accompagnant leurs publications. "On veut connaître le résultat avant même que les Français aient voté", regrette le journaliste qui, du haut de ses trente-sept années d'expérience, fustige "le temps passé à commenter les sondages" qui "détourne les personnalités politiques et les médias de l'essentiel : la rencontre avec les citoyens, le débat d'idées". Il y a quelques semaines, c'est Jean-Luc Mélenchon qui a ouvert un nouveau front, accusant les sondages d'être faussés, puisqu'ils ne prennent en compte que les citoyens certains d'aller voter et feraient donc l'impasse, selon lui, sur une partie de l'électorat populaire. Les sondages sont-ils vraiment si dangereux ? Leur influence n'est pas négligeable. Un martèlement sondagier peut dissuader de donner sa voie à un "petit" candidat qui semble n'avoir aucune chance de l'emporter. Mais, pris avec précaution, ils livrent des photographies d'un électorat à un instant T. Les interdire ne serait-il pas encore plus dangereux pour la démocratie ?
Voir le numéro de la revue «l' Obs, 2988, 27/01/2022»
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